Chères consœurs, chers confrères,
Les jours se suivent et se ressemblent, nous sommes alertés ce jour par la proposition d’un amendement au PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité Sociale) visant l’interdiction de toute référence à la psychanalyse dans toute la pratique psychiatrique.
Au-delà de l’attaque de la pratique psychanalytique en elle-même, il est urgent ici de dénoncer une attaque de la psychiatrie et surtout de la pensée clinique et de l’écoute des patients. C’est bien ici une école de pensée fondatrice de nos pratiques de soins qui est attaquée.
N’étant moi-même pas psychanalyste, je me trouve tout à fait légitime pour en parler. Je suis atterrée de cette attaque et ne pas défendre une école de pensée, c’est avant tout laisser la porte ouverte à un démantèlement des fondements de nos pratiques qui sont œcuméniques. Les psychanalystes ont contribué à l’avènement de la psychiatrie actuelle et je voudrais illustrer mon propos par un exemple concret :
Aujourd’hui, je suis sollicitée par une étudiante en 3e année de médecine pour un travail en SHS (Soins humanités et société) sur le PTSD en tant que pathologie chronique. Quelle surprise ! Même le DSM 5 a des inspirations psychanalytiques et ne serait pas formulé ainsi sans les travaux historiques des psychanalystes…. Devrais-je m’abstenir de le lui dire ????
Devrais-je me priver de lire des ouvrages sur la psychiatrie institutionnelle, me limiter dans mes pensées lorsque je pense à Deuil et mélancolie ou encore me flageller lorsque je relis Paul-Claude Racamier.
Toutes nos pratiques sont issues de cette filiation.
Soyons sérieux !
C’est bien la psychiatrie qui est attaquée et attaquer la psychanalyse n’est que le début d’une attaque uniformisante et laminante de la pensée clinique, une attaque du soin et de nos capacités à penser l’autre. C’est aussi nous voler ce qui fait l’essence de notre engagement auprès des patients et notre rôle de vigie dans la société. C’est ce rôle politique et critique que l’on tente de nous voler.
Accessoirement, c’est aussi nous confisquer un outil de pensée qui nous aide à trouver les ressources nécessaires pour supporter l’insupportable.
IL EST NÉCESSAIRE QUE NOUS NOUS EN PRÉOCCUPIONS COLLECTIVEMENT, CAR TOUTES LES PRATIQUES Y COMPRIS NOS PRESCRIPTIONS MÉDICAMENTEUSES ET D’ARRÊT DE TRAVAIL SONT ATTAQUÉES PAR CE PLFSS.
C’est bien ici un entonnoir attentionnel qui vise à nous faire CONSENTIR à des sacrifices et à l’uniformisation de nos pratiques, un pas dystopique qui pense l’humain comme une machine à besoins standardisés, gommant les diversités et les contextes sociaux dans lesquels les vies de nos patients s’inscrivent.
Je préfère ici ne rien formuler au sujet des personnes responsables de ces attaques et qui sont tant défensives et indigentes d’elles-mêmes…
Heureusement pour moi je vais finir ce week-end avec un bon livre qui parle d’esthétique et de rencontres individuantes avec l’art. Pour ma chance, on ne s’attaque pas encore aux psychiatres phénoménologistes et aux philosophes qui parlent eux aussi du processus d’individuation… Mais bon… Vigilance ! À quand la disparition de la philo au bac ?
Mobilisez-vous ! Il est essentiel de communiquer au maximum avec vos entourages.
Soutenez-nous ! Adhérez !
Bien à vous
Docteur Stéphanie QUINTIN
Secrétaire générale adjointe
