Quels enjeux pour le DPC ?

Depuis le 01/01/2013 les médecins ont vu le DPC (développement professionnel continu) se substituer à la formation médicale continue (FMC) à laquelle est désormais adjointe de façon étroite l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP).

A la faveur de cette mutation, la HAS a pu imposer sa méthodologie, son vocabulaire néolibéral (on parle de développement et plus de formation, d’étape cognitive et plus d’acquisition de connaissances), continuant à creuser le sillon de la protocolisation, de l’imposition de la norme.

Fallait-il entrer dans le dispositif ou refuser de passer par les fourches caudines du formatage HAS ? Le BIPP s’est déjà fait l’écho de ce débat.

Nous avons fait le pari, pour la survie de nos formations, que le passage par la mise en forme ne nous ferait pas céder sur le fond. Que ce soit par l’implication dans la constitution de l’ODPC de spécialité (ODPCPSYSM) dont l’objectif est de permettre à de petites associations de poursuivre leur travail scientifi que, ou par les démarches titanesques en vue de l’agrément de notre propre organisme « Psychiatrie Privée » (ODPCPP), nous avons oeuvré à la construction du cheval de Troie plutôt que de sonner la retraite.

La moyenne d’âge des adhérents leur permettrait en effet de faire le dos rond, le temps d’une réelle mise en place du dispositif pouvant amener à l’âge de la retraite.

Ce serait céder sur un de nos devoirs essentiels, un des fondements de notre éthique : l’engagement dans la transmission. Ce serait aussi trahir les jeunes psychiatres qui nous rejoignent plus nombreux tous les ans.

Nous sommes dépositaires d’un art, notre métier, d’une clinique fondée sur la psychopathologie, qui se construit par la rencontre engagée avec le patient, avec une écoute attentive ne réduisant pas la psychiatrie à une spécialité médicale comme une autre mais qui laisse toute sa place à la parole, prêts à accueillir toutes les manifestations du psychisme humain sans les réduire à un dysfonctionnement cérébral ou aux effets d’une maldonne génétique.

Cette passion, cette disponibilité au transfert, nous nous devons de les transmettre à ceux qui nous suivent. Après, nous évitons le déluge ; ne livrons pas les jeunes psychiatres et leurs patients au risque de la pensée univoque de leur formation universitaire, relayée dans le cadre du DPC par des offi cines relookées pour la circonstance en disciples de la HAS, le plus souvent pour faire marcher leur commerce.

Nous avons craint de perdre notre âme en intégrant le dispositif, ne la perdrions nous pas davantage en renonçant à être des passeurs ?

Françoise Labes

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